Biodiversité en verger : un pilier de la durabilité

De quoi s’agit-il ?

Le terme biodiversité, très général, regroupe la diversité génétique, la diversité des espèces et la diversité des écosystèmes soit la diversité du vivant à toutes les échelles. Cette diversité biologique est liée aux conditions pédoclimatiques et au contexte paysager, c’est-à-dire à la diversité des habitats et des cultures présentes au niveau de l’exploitation ainsi qu’à une échelle plus régionale.
La biodiversité de chaque verger dépend de ses caractéristiques propres (âge, densité de plantation, variétés…), des pratiques culturales et de son historique. Cela concerne l’ensemble de la faune et de la flore présente dans toutes les zones pouvant tenir lieu d’habitat : le sol et l’enherbement de l’inter-rang jusqu’aux abords des parcelles, les haies, les fossés, les délaissés en friche, … Ces habitats semi-naturels sont favorables à une faune variée (oiseaux, mammifères, entomofaune aérienne, faune du sol, micro-organismes…).

Points clés

  • Favoriser de manière générale la biodiversité en milieu agricole par deux grands types d’actions :
    – la préservation et la création d’habitats semi-naturels variés pour lesquels il faut veiller à leur connectivité, leur surface (ou pourcentage dans le paysage agricole) et leur qualité d’accueil,
    – l’adaptation des pratiques agricoles pour l’utilisation d’intrants,
  • Adapter dans le temps la gestion des différents habitats :
    – entretien extensif des milieux, par exemple des fauches tardives ou espacées de 2-3 années,
    – préservation d’arbres morts à l’extérieur du verger,
    – élagage parcimonieux des haies,
  • Passer du modèle de la « propreté » à l’introduction d’un certain « laisser-faire », par la préservation de zones non touchées tels que ronciers, tas de branches…

Attention

  • Ne pas être antagoniste des mesures prophylactiques, un compromis est à trouver ;
  • L’environnement direct du verger peut être source de contamination notamment dans le cas de la punaise diabolique et plus généralement des espèces invasives sans prédateurs naturels.

Bon à savoir

  • Le verger est un habitat en tant que tel. Les espèces peu mobiles resteront inféodées à la parcelle (certains carabes, araignées, vers de terre, micro-organismes…) alors que d’autres ne feront qu’y passer, y nicher ou s’y alimenter temporairement (les oiseaux, mammifères, insectes volants…) ;
  • Le verger interagit donc avec son environnement immédiat (haies, enherbements de bordure) et plus lointain (bois, bosquets, plan d’eau, friche, …).

Focus

  • La biodiversité est une source de services écosystémiques multiples qui peuvent être profitables à la durabilité ou à l’amélioration du fonctionnement de tout système cultivé : la pollinisation, la fertilité du sol et bien entendu la régulation des ravageurs ;
  • Concernant la régulation biologique naturelle, la synthèse de nombreuses études dans différentes cultures, montre un effet favorable de la diversification végétale dans et autour des parcelles sur la présence des ennemis naturels, et, en cascade, sur la diminution des ravageurs :
    – en arboriculture cela se traduit par des changements de la couverture du sol ou des aménagements de bandes fleuries et de haies,
    – les effets visibles portent sur un contrôle biologique accru du puceron cendré et du puceron vert, des tordeuses et des acariens phytophages,
  • Les aménagements favorisent particulièrement les auxiliaires généralistes aussi bien invertébrés (insectes et araignées) que vertébrés (rapaces, oiseaux, chiroptères, mammifères carnivores). Ces auxiliaires sont d’un grand intérêt car ils se maintiennent de façon constante dans les vergers et peuvent agir même sur une faible densité de ravageurs. Ils réalisent donc un travail « invisible » difficilement quantifiable, mais bien réel.

Conseils

  • Envisager l’exploitation arboricole sur un plan global de gestion pour lequel la pérennité des structures agroécologiques est indispensable ;
  • Prévoir, si nécessaire, lors du renouvellement des parcelles d’implanter des haies, de laisser des espaces enherbés ou d’installer d’autres aménagements ;
  • Ne pas éloigner, dans l’idéal, les arbres cultivés de manière conventionnelle de plus de 100 m environ d’une infrastructure agro-écologique autrement dit envisager des surfaces de verger au plus de 4 hectares. La taille des parcelles a un impact sur la biodiversité. Les grandes surfaces limitent fortement la dispersion et les capacités d’action des auxiliaires ;
    – En cas d’utilisation de confusion sexuelle, une pose de diffuseurs doit être envisagée dans les aménagements agro-écologiques pour ne pas créer de zone d’accouplement entre parcelles de pommiers,
  • Transformer, aménager par exemple en bosquet les « bouts » de champs, aux formes géométriques peu adaptées à la mécanisation ou à l’efficacité des chantiers :
    – 8 à 10% des surfaces d’une exploitation occupées en habitats semi-naturels sont déjà estimées comme un très bon niveau.
  • Favoriser la diversité et la connectivité des habitats entre eux et avec l’existant (ex. un bois attenant à l’exploitation, prolongement de haie, …) dans une optique d’infrastructures agro-écologiques ;
  • Raisonner les aménagements sur carte à l’échelle de l’exploitation et de son environnement immédiat, voire en concertation avec le voisinage.

Agriculture biologique

  • L’efficacité moindre des produits utilisables en Agriculture Biologique, invite à compter beaucoup plus sur les apports de la diversité des plantes et des milieux. L’attention portée aux aménagements favorisants la biodiversité fonctionnelle sera renforcée.
  • Biodiversité à moins de 50 m. Veiller à réduire la distance entre le centre du verger et la zone extérieure de biodiversité à 50m maximum, soit une dimension théorique de parcelle d’1 ha.
  • Biodiversité dans le verger. Ne pas hésiter à insérer des « plantes de service » à l’intérieur même du verger, au plus près des arbres, voire à la place de certains arbres. Cette configuration est de loin la plus efficace.

Les haies

De quoi s’agit-il ?

Les haies jouent un rôle majeur, dans le maintien de la biodiversité. La diversité des espèces floristiques et la présence de l’ensemble des strates végétales (herbacée, buissonnante, arbustive et arborée), permettent de multiplier les sources d’alimentation, les abris (gradients d’humidité et de température), les zones de reproduction et de circulation. Cet ensemble est essentiel à une valorisation optimale de l’intérêt écologique de la haie. Par ailleurs, la haie limite l’action du vent et ses effets néfastes sur l’épiderme des fruits.

Bon à savoir

  • Les haies constituent des habitats riches en arthropodes, groupe de prédateurs fonctionnel dominant (araignées, coléoptères, diptères, hémiptères et des parasitoïdes hyménoptères). Ils se nourrissent aux dépends des insectes phytophages qui se développent sur ces haies mais également dans le verger ;
  • Les haies hébergent à leur pied, une faune du sol spécifique, notamment des détritivores. Elles fournissent aussi le gîte et le couvert pour une multitude d’oiseaux, de chauves-souris et de micromammifères. Les haies peuvent donc être la source d’auxiliaires variés pour les cultures qui peuvent agir sur les ravageurs du verger.

Focus

  • L’intérêt fonctionnel de la haie en arboriculture a été étudié de façon approfondie dans le cas du psylle du poirier, à travers son impact favorable dans le contrôle des populations de ce ravageur. L’effet des haies sur la diffusion des auxiliaires dans le verger a pu être mesuré jusqu’à 75 m à l’intérieur des parcelles ;
  • Des travaux de marquage sur les araignées, ont montré des déplacements réguliers d’auxiliaires (araignées, forficules, …) depuis les haies vers les vergers, avec des preuves que certains d’entre eux avaient consommés des pucerons cendrés ;
  • Les haies ont également un effet sur la distribution des ravageurs des cultures. Par exemple, lorsque la densité du réseau de haies augmente, l’abondance du carpocapse diminue. Le carpocapse du pommier est moins abondant à proximité immédiate des haies et les agrégations de larves se font plutôt à l’opposé des haies. On observe moins de carpocapse dans les parties ombragées et sous la protection contre le vent.

Conseil

  • Les critères qui interviennent dans la qualité des haies sont les suivants :
    – la qualité structurale est maximale avec la présence des trois strates (herbacée, arbustive et arborée) associée à une banquette herbeuse,
    – la composition botanique : la présence de plantes ligneuses à feuilles caduques, à feuilles persistantes, de résineux/conifères et épineux et de type de fructification (fruits secs, baies rouges et baies noires) variés est un élément favorable, chacun ayant un rôle différent. On estime à une quinzaine environ le seuil du nombre d’espèces nécessaire pour avoir un effet favorable sur la diversité des auxiliaires,
    – l’augmentation de la largeur, comme de la longueur des haies permet de faire croître dans le même temps le « réservoir » d’espèces (en qualité et surtout en quantité),
    – Le mode de gestion et l’intensité de l’entretien, notamment l’intensité de taille et son époque, ont une importance sur les peuplements. Ils déterminent la structure de la haie,
  • Les structures associées aux haies, telles que les fossés et talus, voire la plantation de haies sur talus, sont favorables à la richesse des peuplements en créant des micro-habitats et des microclimats diversifiés ;
  • La présence de tas de pierres, de branches, d’arbres morts et de murets multiplie les gîtes (oiseaux, chauve-souris) et les places d’ensoleillement (reptiles).

Attention

  • Les défauts d’entretien des haies sont fréquemment dus, soit à un manque de renouvellement (arbres moins touffus ou moins fructifères), soit, au contraire, à un excès d’interventions ;
  • Le maintien de quelques vieux arbres creux peut permettre d’accueillir des chauves-souris ou des oiseaux cavicoles et la présence de branches mortes au sol est favorable aux insectes xylophages, aux micromammifères et aux reptiles ;
  • Tous les travaux sont à raisonner de manière à minimiser les impacts négatifs sur la faune et la flore sauvage (taille en fin d’automne, suppression des paillages, fauche tardive des banquettes herbeuses) ;
  • La taille des haies doit être minimale. Il faut laisser se développer en largeur les structures basses et éviter de créer une structure compacte en mur. Dans ce but, il est donc recommandé de prévoir une emprise au sol pour la haie de l’ordre de 6 m environ.

Agriculture biologique

  • La haie doit être considérée comme un réservoir de biodiversité. Elle interfère à long terme avec l’équilibre faunistique du verger. Il faut en effet être conscient que les insectes présents dans une haie favorable ne sont pas des « pompiers » qui vont se précipiter pour éliminer quelques foyers de ravageurs dans un milieu beaucoup moins favorable et beaucoup plus perturbé. Il ne faut pas oublier non plus que les structures paysagères sont des couloirs de circulation privilégiés de nombreux prédateurs tels renards, mustélidés, chiroptères, …
  • Faciliter les transferts
  • Des passerelles peuvent être aménagées pour faciliter le transfert entre la haie et le verger, par exemple, des zones non fauchées entre la haie et le premier arbre de la rangée ou bien tous les 15m une branche qui avance en surplomb au-dessus des têtes de rang.
  • Doubler les haies
  • Par ailleurs, il est souvent difficile d’obtenir une haie remplissant simultanément les rôles de brise vent et de biodiversité fonctionnelle, et particulièrement pour une haie sur une seule ligne. Une solution est d’associer à quelques mètres d’intervalles, une ligne d’arbres hauts avec priorité brise vent, à une ligne d’arbres et arbustes de bourrages, plus bas, avec priorité biodiversité. La proximité entre les arbres de haut jet et les fruitiers étant dans tous les cas à éviter, le rajout d’une ligne d’arbres plus bas ne fait pas perdre de surface. Le chiffre de 6m d’emprise de la haie peut être respecté, qu’elle soit simple ou double.
  • Trouver le juste équilibre
  • Il faut un peu de « laisser faire » pour qu’un milieu devienne naturellement plus équilibré. Cependant, il faut orienter l’évolution du milieu en éliminant les plantes favorables à certains bioagresseurs, tels l’aubépine pour le feu bactérien ou le noyer pour le carpocapse.

Enherbements, bandes fleuries et tournières

De quoi s’agit-il ?

La valorisation des zones enherbées non cultivées, voire des inter-rangs, par une gestion adaptée (sous forme de bandes fleuries) permet de fournir des ressources en pollens, nectar et graines aux insectes auxiliaires (prédateurs et parasitoïdes), aux pollinisateurs sauvages (abeilles et bourdons) et aux oiseaux (orthoptères).
Le choix des espèces peut être orienté afin de favoriser les ennemis naturels pour améliorer le contrôle des ravageurs.

Bon à savoir

  • Quelques études menées en conditions réelles de production démontrent l’efficacité des bandes fleuries sur la régulation naturelle des ravageurs. La présence de mélanges fleuris implantés dans des vergers de producteurs dans l’état de Washington (Etats-Unis) a entrainé une augmentation de l’abondance des prédateurs aphidiphages dans les colonies de pucerons lanigères et une réduction des densités de ce ravageur ;
  • Les mélanges fleuris attirent une plus grande diversité et une plus grande abondance d’ennemis naturels que les enherbements classiques des inter-rangs de vergers cidricoles, soulignant l’intérêt de la mise en place de telles infrastructures ;
  • Une étude récente montre que l’enrichissement en plantes fleuries en inter-rang réduit les fondatrices de puceron cendré et les dégâts sur fruit a un niveau économique acceptable sans insecticides. L’effet est dû à l’augmentation de la densité en araignées à toile à l’automne, prédatrice de ce puceron au moment du vol de retour (alors que les auxiliaires de printemps n’ont pas d’effet significatif).

Focus

Les semis comprennent des mélanges de plantes à fleurs et souvent d’une légère proportion de graminées peu concurrentielles (type fétuque ovine) ;
• En verger, les plantes bisannuelles et vivaces sont à privilégier. Il faut privilégier le semis de plantes natives de la flore spontanée plutôt qu’exotiques ;
• Le choix est conditionné en premier lieu par l’adaptation aux conditions pédoclimatiques (attention aux mélanges « tout prêt » parfois peu adaptés aux régions à faible régime pluviométrique ;
• La complémentarité et la fonction des espèces végétales sont plus importantes que leur nombre ;
• Il faut davantage s’intéresser à certains critères, tels que l’époque de floraison, la capacité d’attraction des auxiliaires et des ravageurs, la pérennité et la facilité de gestion des plantes ;
• L’époque de floraison doit être la plus longue possible, mais surtout adaptée au ravageur ciblé (précocité par exemple pour le puceron cendré) ;
• Les meilleures familles pour favoriser les prédateurs (coccinelles, syrphes, chrysopes) appartiennent aux Apiacées (Ombellifères), Brassicacées, Astéracées (Composées) et Chénopodes. Par exemple, les syrphes voient leur reproduction stimulée par la présence de fleurs (Brassica, Sinapsis et Raphanus), plusieurs hyménoptères parasitoïdes se nourrissent de préférence du nectar de certaines Apiacées, alors que les fleurs des Astéracées servent de source de glucides pour les larves des chrysopes.
• Pour la constitution d’un mélange fleuri, visitez le site https://wiki.itab-lab.fr/muscari

Conseils

  • Privilégier un entretien extensif avec une fauche en hiver et l’absence de tout traitement herbicide ou insecticide.
  • Combiner, selon leur nombre, des bandes fauchées et des bandes laissées sans entretien ou avec des coupes tous les deux à trois ans.
  • Installer les bandes fleuries et enherbements attractifs en dehors des zones subissant les dérives de traitements, c’est-à-dire assez loin des bordures de parcelles pour éviter tous contacts avec les insectes pollinisateurs et auxiliaires.

Attention

  • En France, respecter la législation abeille, qui a pour objectif de protéger les pollinisateurs et interdit tout traitement en présence de fleurs ou d’exsudats ce qui limite fortement les spécialités utilisables (mention « abeilles ») ;
  • Eviter la fauche des couverts en pleine végétation pour favoriser leur durabilité (sinon les graminées seront favorisées au dépend des autres espèces) et préserver l’entomofaune ;
  • Prendre en compte, surtout en arboriculture, le manque de pérennité des bandes fleuries :
    – évolution de la composition floristique au cours du temps, avec un envahissement de la végétation spontanée qu’il est difficile de maîtriser
    – variation de la répartition des espèces en fonction de la nature du sol et des précédents culturaux où sont semées les bandes fleuries,
    – évolution de la flore potentiellement intéressante selon la nature des plantes amenées (menthe poivrée), mais aussi plus problématique lorsque les graminées prennent trop le dessus.
  • Surveiller les campagnols qui peuvent coloniser le verger à partir de zones naturelles.

Agriculture biologique

Les bandes fleuries, si elles sont en dehors du verger sont simplement complémentaires des haies, ce qui est déjà positif. Mais pour un maximum d’efficacité les bandes fleuries doivent être au plus près des pommiers, afin de faciliter le transfert des auxiliaires.

  • Intégrer les bandes fleuries dans l’itinéraire technique
    – planter 50cm plus loin entre rangs pour laisser un peu de place à cette biodiversité botanique,
    – le fait de laisser plus d’herbes hautes, éventuellement proches du pied de l’arbre, peut augmenter la concurrence et le risque campagnol. La surveillance et le piégeage peuvent s’y concentrer. Ces nouvelles contraintes obligent et permettent de réfléchir à d’autres porte-greffes.

En Agriculture Biologique avec les bandes fleuries, nous pouvons viser la gestion des cibles prioritaires suivantes :

  • Pucerons cendrés
    La présence d’auxiliaires contre le puceron cendré est particulièrement importante sur 2 périodes :
    – avant et pendant la floraison du pommier (plus tard les dégâts sur fruits sont déjà faits).
    Attention l’utilisation de l’azadirachtine, voire du spinosad, dans cette période interdit la présence de bandes fleuries. L’avenir de ces substances étant incertain, l’utilisation des bandes fleuries est une technique alternative à anticiper.
    – en automne, après le retour des formes ailées, lorsque les femelles fécondées se nourrissent sur le pommier et y déposent leurs oeufs.
    Mais à cette période la récolte n’est pas terminée, et la présence de zones non fauchées va perturber la cueillette. Les arthropodes les plus efficaces contre le puceron cendré sont les araignées tisseuses de toiles en automne. Des compromis peuvent être envisagés :
    – avec un semis de féverole d’hiver, porteuse précoce de pucerons et donc d’auxiliaires, en décapitant les parties fleuries avant traitement toxique pour l’abeille. L’adaptation d’un outil et l’homogénéité de développement de la féverole sont évidemment souhaitables mais le semis peut s’envisager même à la volée,
    – et avec le maintien d’une végétation herbacée la plus haute possible en automne, semée au pied des arbres, et favorable aux araignées prédatrices de pucerons.
  • Puceron lanigère
    Dans le cas du puceron lanigère l’action d’Aphelinus mali, micro hyménoptère parasite, est bien connue car efficace, mais parfois un peu tardive. Pour leur intervention précoce, les forficules sont particulièrement intéressants, mais ont besoin de milieux leur permettant de se soustraire à la lumière, tel un enherbement au pied des arbres. De plus les forficules sont également efficaces sur puceron cendré.

Nichoirs, gîtes artificiels et perchoirs à rapaces

De quoi s’agit-il ?

Pour construire leur nid, certains oiseaux ont besoin de cavités. Face à la raréfaction des vieux arbres ou murs anciens où ils aiment nicher, il est intéressant de leur proposer des nichoirs. Cependant, ils ne favorisent une espèce que si le milieu est adéquat et la nourriture appropriée. Des nichoirs bien construits permettent un succès de reproduction au-dessus de la moyenne. La pose de gite, nichoir ou perchoir ne peux s’envisager seule. Si haies, friches ou bandes fleuris sont absentes, le verger est trop pauvre en insectes pour assurer une alimentation suffisante.

Bon à savoir

  • Les larves diapausantes du carpocapse des pommes (Cydia pomonella) localisées sous les écorces sont la proie de plusieurs espèces d’oiseaux qui les recherchent activement, surtout en automne-hiver, période où les chenilles sont rares ;
  • Des études approfondies confirment également l’impact important des oiseaux, notamment des mésanges, sur les populations de carpocapses des pommes, leur prédation pouvant infliger 95 % de mortalité. L’essentiel de la prédation a lieu avant l’hiver (août principalement) et ce sont surtout les mésanges bleues et charbonnières qui sont actives sur les arbres,
  • Des expérimentations conduites aux États-Unis, en Pologne et en Suède, confirment également l’importance des oiseaux dans la lutte contre les larves de carpocapses. Outre les mésanges, les autres espèces impliquées sont la sittelle, le grimpereau des bois et certains pics ;
  • Les pics prospectent les troncs de bas en haut, font sauter les écailles d’écorce ou les perforent de façon caractéristique notamment lorsqu’ils repèrent une zeuzère ;
  • Si les oiseaux ne peuvent réduire à eux seuls les populations de carpocapse en dessous du seuil économique acceptable en verger, ils sont cependant des acteurs importants de la régulation et comptent parmi les prédateurs de ce ravageur.

Focus

  • Les micromammifères (rongeurs et musaraignes), constituent la base alimentaire de la plupart des espèces de rapaces ;
  • Comme pour les autres groupes biologiques, il y a des espèces spécialistes et des espèces généralistes ;
  • Le hibou moyen-duc est typiquement un spécialiste des campagnols, qui représentent jusqu’à 76% des rongeurs consommés (plus de 3000 campagnols consommés annuellement par un couple et ses petits). A l’inverse, la chouette hulotte est une espèce généraliste, chassant aussi bien les rongeurs que les passereaux, voire les chauves-souris ;
  • Le développement des rapaces est lié à la présence de rongeurs et de lieux de nidification.

Conseils

  • Installer gîtes et nichoirs autour des vergers, à l’intérieur dans le cas de conduite en Agriculture Biologique.

Les nichoirs à oiseaux

  • Poser des nichoirs variés pour pallier au manque de cavités ;
  • Adapter le diamètre du trou d’entrée à la taille de l’espèce visée.
  • Utiliser les bâtiments d’exploitation qui offrent d’excellentes opportunités pour installer des nichoirs dans de très bonnes conditions de sécurité pour les oiseaux. Il est possible d’accoler une boîte en bois à un mur côté intérieur et de ménager un trou de sortie à travers celui-ci vers l’extérieur. La chouette chevêche, le faucon crécerelle ou la huppe apprécient ces nichoirs sécurisés ;
  • Utiliser des nichoirs robuste et facile à nettoyer ;
  • Pour les passereaux, dans un cadre professionnel, ce sont généralement les nichoirs en béton de bois (ou aggloméré hydraulique léger) qui sont utilisés car beaucoup plus durables que le bois :
    – lors du nettoyage, il est souvent plus pratique que le nichoir s’ouvre par devant,
    – l’accrochage (entre 1.80 à 3.50 m), dans une ambiance tamisée, pour éviter une surchauffe interne du nichoir, se fait au cours de l’automne et jusqu’à fin janvier, pour laisser le temps du repérage aux oiseaux avant la reproduction,
    – les nichoirs se posent verticalement, voire légèrement inclinés vers l’avant et peuvent se balancer.
  • Densité de pose :
    – pour les passereaux, on prend souvent comme base dix nichoirs/ha : 60% avec un trou de 32 mm, 20% avec un trou de 26 mm, 20% de modèles spéciaux (semi-ouverts, à grimpereaux, etc.).
    – Pour les rapaces répandus (hulotte, crécerelle), les densités de pose sont de l’ordre de deux à quatre nichoirs pour 100 ha car les territoires vitaux de ces oiseaux sont bien plus vastes.
  • Une seule visite de nettoyage à partir de fin juillet est suffisante :
    – enregistrer un taux d’occupation global des nichoirs posés,
    – noter la présence de vieux nids. Avec un peu d’expérience, il est assez facile de distinguer un nid de mésange à base de mousse, crins et poils, d’un nid en dôme de moineau friquet, composé de tiges sèches et de plumes.

Gîtes à chauves-souris

  • Les besoins des chauves-souris sont différents s’il s’agit de mâles isolés, de femelles gestantes, de mères élevant leurs jeunes ou d’individus recherchant un site d’hibernation. Tout au long de la saison, une population s’articule donc toujours sur plusieurs gîtes aux caractéristiques différentes. De ce fait, il n’existe pas de gîte artificiel universel à chauves-souris. De nombreux gîtes sont utilisés dans les bâtiments et hangars agricoles tels que combles, vides sanitaires, tuiles, volets, bardages …
  • Combiner les modèles à fente et en volume susceptibles d’accueillir plusieurs espèces si le milieu est favorable ;
  • Toujours fixer les abris à mi- ombre ;
  • Choisir des lieux tranquilles, sûrs, abrités et riches en insectes ;
  • Privilégier un bocage avec de gros arbres, des plans d’eau calmes, propres (sans végétation flottante) à proximité. Les chances de succès sont meilleures si des chauves-souris sont observées localement ;
  • Fixer les gîtes à des poteaux de 3 à 6 m. Dans le sud de la France, les gîtes plats peints en noir, orientés plein sud, sont assez facilement occupés par les pipistrelles de Kuhl, commune et pygmée, même si le milieu est banalisé ;
  • Clouer, visser ou suspendre, mais il ne faut absolument pas que les gîtes à chauves-souris se balancent ;
  • Poser les abris par groupe de trois à cinq abris sur chaque site pour favoriser leur adoption. Les chauves-souris sont sociables et changent souvent de gîte ;
  • Repositionner les gîtes non occupés au bout de deux ans ;
  • Installer le plus souvent, les gîtes en automne-hiver, en même temps que les nichoirs à oiseaux ;
  • Ne désespérer pas : le taux d’occupation est imprévisible, car très variable et dépendant de nombreux facteurs pas toujours connus. Les gîtes sont surtout occupés par des individus isolés. Une, deux, voire trois espèces peuvent se succéder dans le même gîte, car on observe une occupation très saisonnière ;
  • Contrôler les modèles fermés en hiver pour les nettoyer et noter la présence de crottes. Elles sont noires (fraîches) ou grises (anciennes) et friables (elles s’écrasent facilement entre les doigts car contiennent des restes d’insectes) ;
  • Favoriser la qualité des habitats de chasse autour des cultures : zones boisées, bocage avec de vieux arbres, patrimoine bâti, présence d’eau… Ce dernier point semble avoir d’autant plus d’importance que la région est sèche.

Attention

Fournir le gîte ne suffit pas. Il faut penser au couvert qui se trouvera dans les aménagements écologiques les plus à même de maintenir la biodiversité au sein de l’exploitation.

Agriculture biologique

  • Gîte à forficule
    Des pots en terre, suspendus à l’envers dans les arbres, et remplis de paille, sont des abris appréciés par les forficules. Ces derniers sont utiles contre le puceron cendré, et particulièrement efficaces en début de saison contre le puceron lanigère. Ces pots pouvant facilement être déplacés, il est possible de les concentrer dans les zones à pucerons lanigères.
  • Gîte à mustélidés
    Des tas de cailloux et/ou de bois sont des abris appréciés par les mustélidés (furet, fouine, …), prédateurs majeurs des campagnols. Ce type de dispositif trouve naturellement sa place dans les recoins et délaissés des parcelles, de préférence au plus près d’une haie, afin de bénéficier de l’effet synergique entre aménagements.
  • Gîte à oiseaux
    Une étude de l’INRA Avignon, dans les années 2000, a prouvé la plus grande réussite des nichées de passereaux dans les vergers en Agriculture Biologique. Cependant, il convient d’orienter les entrées des nids afin de minimiser la pénétration de produits phytosanitaires.

Mares, arbres isolés, fossés et petites structures bâties

De quoi s’agit-il ?

L’environnement d’une exploitation présente souvent des éléments favorables à la biodiversité dont on ne soupçonne pas le rôle. Ainsi arbre isolé, mort ou vif, fossé, cabane à outils ou abri pour l’irrigation sont autant de sites susceptibles d’accueillir des auxiliaires et de favoriser leur installation. Avant tout changement ou suppression de l’existant, il convient d’en mesurer les effets.

Bon à savoir

  • Naturelles ou artificielles, les mares attirent toujours une faune diversifiée particulièrement en zone sèche méditerranéenne : chauves-souris (pour chasser et boire), amphibiens, reptiles, oiseaux et mammifères ;
  • L’équilibre écologique des plans d’eau est subtil et précaire. Leur taille conditionne pour une bonne part leur bon ou mauvais fonctionnement. Grands à très grands et suffisamment profonds, les plans d’eau fonctionnent généralement bien, l’eau, qui reste tempérée et claire, n’étant pas envahie de lentilles d’eau ou colonisée par les phragmites et typhas. L’équilibre est bien plus difficile à atteindre sur de petites surfaces ;
  • Même réalisé dans les règles (positionnement à mi ombre, 1.2 m de profondeur au milieu, 8m x 6m, pentes douces étagées, abondante végétation immergée, …), un plan d’eau n’est pas à l’abri de la prolifération d’algues filamenteuses de surface, souvent liée à un excès de phosphore dans l’eau ;
  • En région méditerranéenne, il est plus pertinent de multiplier des plans d’eau de petite surface et de les conduire en mares temporaires. De simples cuvettes, au besoin tapissées d’un peu d’argile pour parfaire leur étanchéité, qui se remplissent à la faveur des pluies automnales et dont l’eau s’évapore en été, sont bien adaptées aux zones chaudes. De plus, la végétation littorale se développe peu du fait de l’assèchement progressif des berges.

Conseils

Arbres et bosquets

  • Favoriser des arbres isolés, ils ont une forte valeur paysagère et patrimoniale. Ils peuvent servir de place de chant et de chasse, de nidification et de repère dans le paysage pour les animaux qui se déplacent et qui chassent (chauves-souris, par exemple) ;
  • Les arbres têtards peuvent héberger plusieurs espèces, dont le lierre, source de baies pour les oiseaux ;
  • Les cavités humides offrent de l’eau aux insectes ;
  • Conserver les arbres morts s’il n’y a pas d’impératif de sécurité ou de prophylaxie. Ils sont un important réservoir de biodiversité en abritant des espèces xylophages (coléoptères, abeilles charpentières) et des oiseaux cavicoles ;
  • Planter ou maintenir des bosquets pour structurer le paysage. Ils peuvent constituer des gîtes, des refuges et des sources d’alimentation pour les oiseaux, les petits mammifères et les insectes y compris les auxiliaires.

Fossés

  • Maintenir les fossés et les talus, secs ou humides, ils assurent un peu de connectivité dans les zones agricoles intensives. Les fossés secs et colonisés par un peu de végétation sont très attractifs pour les reptiles dont les lézards ;
  • Ne pas systématiquement désherber, curer ou bruler les fossés qui peuvent héberger une flore intéressante ;
  • Maintenir des fossés toujours en eau pour héberger batraciens, amphibiens et reptiles aquatiques, comme les couleuvres à collier, vipérine et la tortue cistude, ainsi que des micromammifères. Avec une végétation riveraine à base de phragmites, un cortège d’oiseaux spécialisés peut s’y maintenir (rousseroles, bouscarles…) ;
  • Favoriser fossés et talus, bien fournis en végétation et associés à des haies, ils sont des routes naturelles de vol pour les chauves-souris qui viennent y chasser les insectes, plus abondants près de l’eau.

Attention

  • Ne pas curer les fossés en hiver pour éviter de détruire des nids accrochés dans la végétation, d’écraser des animaux terrés ou d’anéantir des pontes de batraciens ;
    – Ce point n’est cependant pas envisageable en cas d’irrigation gravitaire qui nécessite une infrastructure favorable au passage de l’eau.
  • Eviter autant que possible les broyages répétés.

Focus

  • Il existe dans presque toutes les exploitations, des petites constructions à usage divers ou abandonnées : cabanes d’irrigation, remises d’outils, hangars à matériel, vieux transformateurs, bories…. Avec un peu d’attention, on remarque que ces constructions hébergent souvent des rapaces nocturnes, diurnes, des petits carnivores ou des chauves-souris, en particulier si elles sont isolées et proches de milieux assez naturels ;
  • Il en faut peu pour cohabiter en bonne intelligence avec ces espèces et leur permettre de s’installer durablement en toute sécurité. Une boîte en bois en applique côté intérieur, fournit une cavité de nidification très appréciée et sécurisée pour la huppe, le faucon crécerelle ou le hibou petit duc. Bien entendu, il faut adapter à la fois le trou d’accès et le volume du nichoir à l’espèce visée. À l’intérieur des hangars peu fréquentés, la pose de gros nichoirs fermés à chouette effraie sur les poutres peut attirer cette espèce qui préfère l’obscurité dans la journée ;
  • Beaucoup d’espèces de chauves-souris occupent les bâtiments. Selon la conformation des lieux, on peut leur réserver un volume à l’intérieur de la construction ou leur poser des gîtes sur les façades.